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Angoisse

Bruneau Joussellin

En ce temps de confinement, lorsque nous marchons dans la rue et nous croisons les uns les autres, une angoisse se manifeste à travers les échanges de regards : va-t-il, va-t-elle s’écarter de la route, est-ce moi qui vais le faire ? Angoisse, inquiétude… regards sur autrui.

Regards inquisiteurs qui cherchent à transpercer l'autre pour lui arracher une vérité déjà toute faite : il/elle est porteur de maladie ! Yeux plus meurtrissants que perçants qui se moquent bien de l'autre. Celui qui est ainsi regardé ne peut que baisser les yeux pour ne pas, lui-même, souffrir de la cécité de son bourreau et perdre son âme brûlée au feu de ces yeux désaxés de leur vocation.

Regards qui dévisagent, ils ôtent le visage à force de fixer ce qui ne peut l'être. Un visage ne peut se laisser enclore, il est à la fois fragilité et ouverture vers un Infini qui reste sans cesse à définir puisqu'il est en perpétuel devenir.

Regards durs, véritables murs infranchissables parce qu'ils n'offrent pas de prises. Ils ne permettent pas l'échange.

Et il y a le vrai Regard qui n'est pas de ceux-là. Je ne le redoute pas.

Ces yeux dans les miens,

je sais que je ne risque rien.

Ils m'en-visagent.

Ils sont caresses.

Une caresse qui « consiste à ne se saisir de rien, à solliciter ce qui s'échappe sans cesse de sa forme en un avenir – jamais assez avenir... Ce n'est pas une intention de dévoilement, mais de recherche : marche à l'invisible » (Emmanuel Levinas).

Regard sous-tendu par un sourire.

La bouche prend la forme d'un filet tendu sous les yeux.

Il protège d'une chute de haute-voltige.

Alors tous les sauts, même les plus improbables deviennent possibles.

Voilà pourquoi, je cherche ce Regard au milieu de la grande ville.

Résolution l’angoisse.


Tableau de Gao Xingjian, L'angoisse 005

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