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L’Æntre
Bruneau Joussellin

Françoise Dutrieux
Plus qu’aucun autre, ce temps de confinement et bientôt de déconfinement, même progressif, est placé sous le signe de l’incertitude qui crée de l’angoisse puisqu’elle est celle du moment de la mort. Pourtant, c’est oublier que toute vie est marquée dès son commencement par une seule certitude : toute personne qui naît est déjà assez âgée pour mourir. Ou pour reprendre la célèbre formule de Descartes : je pense donc je suis, je suis donc je ne serai plus. N’en déplaise au transhumanisme qui nous promet l’éternité et qui n’est jamais qu’un positivisme nouveau dont on sait qu’il a fini par buter sur deux guerres mondiales successives et leurs millions de morts… désespérance !
Dit ainsi, la vie semble absurde puisque dès son commencement étant appelée à s’arrêter. C’est oublier qu’entre les deux bornes de l’existence, il y a le devenir, le temps et la richesse de son incertitude. Il y a donc quelque chose, quelqu’un « entre », un je, un tu, un nous… c’est là l’æntre de l’Existence.
Nous sommes confinés. Certes. Mais il y a cet æntre qui fait le Tout. L’antre, c’est la limite spatiale et géographique : une pièce, quatre murs, un appartement, une demeure, un temps de vie de je, de tu… le fini. Dans cet antre s’éploie l’entre : l’espace, la porte, la fenêtre, l’air qui circule, tout entre l’existence de je et de tu… l’infini. L’Alchimie sait les limites de l’antre (la matière) et les possibilités infinies de l’entre (l’antimatière), du moment et du temps du livre de l’Ecclésiaste, de l’Incarnation et de l’Esprit de l’évangile de Jean.
En son temps, Jésus l’a dit : « Le Royaume est entre vous » … il est l’æntre, fusion de l’antre et de l’entre. Je le relie, ici et maintenant, en ce moment et dans ce temps, je le relis dans ce tableau de Françoise Dutrieux.
« Ne pense pas qu’il soit si long d’aller au ciel ;
Tout le chemin pour y mener ne fait un pas. »
Angelus Silesius