- eglisedumusee
Les Pèlerins du temps
Bruneau Joussellin
à Johanne, Greg et Julien... les papillons...

À l'aube de l'existence,
au sortir des eaux écarlates,
les pèlerins du temps
vivent en déligature de la mer;
césure désamarrante
où n'être n'est plus en question,
mais élan de la vie à la vie.
Au matin,
ils se dressent,
arrachement à la terre.
Leurs mains-racines
s'ouvrent
de caresse en saisissement,
se tendent
de salutation en donation,
et se joignent
de cueillir en recueillir.
Leur face-au-sol,
en embrasant le monde du regard,
se découvre visage,
fenêtre de l'en-dehors et de l'en-dedans,
paysage de l'âme
qui désormais ne cessera
de vibrer aux accords les plus intimes.
Leur souffle-chasse-poussière,
de lointain en hauteur,
se mêle aux quatre vents,
s'enivre de fragrances diaphanes
jusqu'à l'insufflation du chant,
voix qui crée de l'espace
entre le dicible et l'invisible.
Les pèlerins du temps,
avant que ne vienne l'heure du milieu,
osent un pas...
à l'encontre de toute raison.
Là-bas
Tout est neuf et tout est sauvage
Libre continent sans grillage.
N'y va pas!
Les gens d'ici n'ont rien de rien
Rien devant eux
Que l'infini de la grand' route.
N'y va pas!
Demain dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Vois-tu...
N'y va pas!
Par les soirs bleus d'été, j'irai dans les sentiers...
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature...
N'y va pas!
Mon enfant, ma soeur,
Songe à la douceur
D'aller là-bas vivre ensemble!
N'y va pas!
Entre zénith et nadir, ils sont déjà loin
sur le chemin qui les mène
de hauts-lieux en bas-fonds,
confluence du Très-bas et du Très-haut.
Ils n'ont rien à conquérir,
tout à atteindre,
quête de l'ici et du maintenant
qui, demain et ailleurs,
sera encor leur ici et maintenant
en nouvel éveil.
Voie de l'in-fini,
illumination,
quand chaque pèlerin
découvre que l'univers
est en expansion de ses pas.
À la brise du soir,
vêprée en résonance divine,
le marcheur de l'inutile,
par-delà les souffrances perçues
découvre la grâce
tout en beauté reçue
qui fait de lui un veilleur
sur la pierre angulaire
sur la pierre angulaire
s'asseoir au jardin
vient s'asseoir au jardin de
le pèlerin vient s'asseoir au jardin de lui-même
Sentinelle en alarme...
alarme... larme... âme...
M... il aime
Nuit...
flamme et chant...
corps à la terre,
stellaire le regard...
j'ai si soif...
ardeur des sens,
exhalaison de l'atma...
ascension vivifiante...
oblation de l'instant,
traces d'éternité...
tout en ces complies...
clarté...
plénitude...